Culturel
" Une
biographie de peintre Alsacien "
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Camille-Edmond Wagner
(1908-1976)
Camille,
Edmond Wagner, Autoportrait,
1974, Huile
sur toile, collection particulière © Photo: M. Meyer Etudiante en Master 2 Histoire de l’Art à l’Université de Strasbourg, Monique Meyer s’intéresse au travail artistique et artisanal de Camille Edmond Wagner, un peintre régional, (1908 Strasbourg-1976 Strasbourg), maître peintre en décors, en lettres et en enseignes et artiste peintre. Cet intérêt est motivé par le talent artistique de Camille Wagner et l’utilisation des techniques de la peinture sous verre et de l’églomisé dans son activité professionnelle de peintre en décors. 1
Huile sur toile (102 x 130 cm) Collection particulière © Photo: M. Meyer La double signature © Photo: M. Meyer « Camille Wagner était un artiste de la vieille école qui connaissait son métier à fond et excellait dans tous les genres, de la nature morte au portrait qu’il aimait présenter dans des costumes historiques, comme celui qu’il a fait de Hans Haug en uniforme de sapeur-pompier. Nature romantique et sentimentale, il cédait volontiers à l’attrait de coloris doucereux, mais était parfaitement capable de créer, dans ses paysages des ambiances d’une rare délicatesse. Alsacien dans l’âme, il a voué au paysage alsacien, au paysan alsacien, un grand nombre de toiles dont la perfection technique est quasiment irréprochable. Il a consacré aux aspects du vieux Strasbourg dont l’un ou l’autre ont déjà disparu, des toiles d’une émouvante tendresse… »
De ces influences on peut dire que la peinture de Camille Wagner est une peinture à tendance régionaliste (au sens artistique du terme). Le régionalisme alsacien pour cette période, d’un point de vue stylistique, est un mélange de tradition rurale et de style du XVIIIème siècle français. Il semble que Louis Philippe Kamm, qui peint des toiles ayant pour thème la vie des paysans alsaciens et qui enseigne en peinture décorative a pu influencer C.Wagner. Il est qualifié de peintre réaliste à connotation régionaliste.
En avril 1939, Camille Wagner crée son entreprise d’enseigne et publicité. Comme tous les réservistes, Camille Wagner fut contraint à une période militaire. Ses talents seront utilisés pour la décoration du Fort Frère sur la colline d’Oberhausbergen, près de Strasbourg. Il décore la chapelle de ce fort ainsi que la salle de théâtre. Et à ce titre réalise une peinture sous verre représentant une tête de Christ.© Photo: M. Meyer Il travaille à Strasbourg pendant la guerre et l’annexion par l’Allemagne.
Au sortir de la guerre il continue son travail dans une ville redevenue française et meurtrie. Il sera le témoin artistique des dommages de guerre et de la disparition de nombreux lieux anciens de Strasbourg. L'oeuvre Notre Dame, après le bombardement du 11 Août 1944, Dessin au fusain sur papier, 45,3 x 32,5 cm, Cabinet des Estampes et des Dessins de Strasbourg © Photo: M. Meyer Le cabinet des Estampes et des Dessins est une collection d'arts graphiques faisant partie des Musées de la Ville de Strasbourg. Il conserve ce dessin depuis 1947, date de son achat à la Maison d’Art Alsacienne, par Paul Ahne conservateur à l’époque. Pris sur le vif ce dessin est un témoignage d’un moment douloureux de l’histoire de Strasbourg et montre toute la virtuosité de l’artiste comme l’indique cet article des DNA5 (Dernières Nouvelles d’Alsace) de 1947 (07/01/1947) concernant une exposition de Camille Wagner et Gérard Bliekast à la Maison d’Art Alsacienne rue Brulée à Strasbourg. En 1944, le 11 août, les bombardements américains atteignirent gravement, en même temps que la cathédrale et le Palais des Rohan, la Maison de l’Œuvre Notre Dame. La reconstruction de celle-ci, rapidement menée par la ville et le service des Monuments Historiques, permit une réorganisation générale du musée, mais la remise en état complète de la résidence des princes-évêques ne s’acheva qu’en 1978. C’est durant cette période que le cabinet des Estampes s’affranchit progressivement, sous la tutelle de Paul Ahne, de sa dépendance par rapport au Musée des beaux-Arts, avant de quitter le palais Rohan et de prendre possession dans les années 1980 de nouveaux locaux au 5, place du Château. Une des premières expositions de ces deux artistes, encore jeunes. Tous deux sont membres de l’AIDA, et bénéficiant d’une critique élogieuse de la part de Marc Lenossos (1897-1968)6: «… Il (C.Wagner) demeure plus influençable que son camarade (G.Bliekast) et sa personnalité, encore hésitante, subit encore quelques réminiscences (Edouard Hirth, dans la nature morte n°29 ;- Luc Hueber dans « l’église St Aurélie »n°21) ; Mais l’habileté picturale est acquise-servie par un prodigieux talent de dessinateur……. Tirons notre chapeau bien bas devant son assurance, cette aisance, ce tracé aéré, cette aptitude à suggérer une atmosphère et à exprimer le tout en quelques traits et tâches essentielles. Ses dessins de bombardements sont tous des dessins de maître…….les dons exceptionnels de Camille Wagner… »La peinture décorative. Le métier de peintre.
Pour exercer son métier de peintre en décor en
Alsace, Camille Wagner dont le diplôme de l’Ecole
des arts décoratifs n’est pas
reconnu par la Chambre des Métiers d’Alsace doit
passer son brevet de maîtrise
d’abord en français puis en allemand (pendant la
guerre) ! Une
particularité alsacienne, instaurée par le
gouvernement allemand en 1899
et définie par le droit local7.
Ce métier sera exercé toute sa vie en parallèle de sa carrière artistique. Camille Wagner a une double signature, l’une pour son activité artistique et l’autre pour son entreprise artisanale. Un autre centre d’intérêt est qu’il pratique son métier de façon originale par l’exécution de peintures sous verre et d’églomisé, à titre publicitaire (les enseignes en verre). C’est probablement ce métier de peintre, que Camille Wagner détient de façon virtuose qui transforme ses créations artisanales en véritables œuvres d’art pour certaines. Mais qui fait aussi que son travail d’artiste a peut-être souffert de cette « concurrence ». Les responsabilités liées à son activité professionnelle ne lui ont pas permis d’avoir la disponibilité de se donner totalement à la création artistique et ainsi de se « faire un nom » au-delà des limites de la région, malgré son grand talent.Son travail de maître peintre
en décors, en enseignes et en lettres:
Des œuvres de Camille Wagner, considérées comme de la peinture décorative et en lien avec son métier de Maître peintre en décors, en lettres et en enseignes, sont encore visibles à Strasbourg ; On peut citer notamment la fameuse peinture sous verre et les fresques murales du restaurant « Aux armes de Strasbourg », faite dans les années 1960.Elle est visible dans le restaurant « Aux armes de Strasbourg » place Gutenberg. Restaurant "Aux armes de Strasbourg", fresque et peinture à l'huile sous verre de Camille Edmond Wagner © Photo: M. Meyer Restaurant "Aux armes de Strasbourg", détail © Photo: M. Meyer
La technique en transparence permet d’effacer les traces des pinceaux et grâce à un éclairage par l’arrière de donner l’apparence du vitrail. Mais un vitrail nécessite des cloisons en plomb, ce qui donne un rendu très différent d’une peinture sous verre, qui va alors s’apparenter à un tableau de chevalet très lumineux.
On peut admirer aussi, 5 rue du Dôme, un véritable églomisé, enseigne frontale du magasin « Au doux pays de France »; là aussi un savoir-faire qui a disparu. Il date des années 1960 et porte la signature « art déco » de l’entreprise Wagner (W). Il surmonte un magasin de chocolats. Un bel et dernier exemple de ce savoir-faire de l’écriture à l’envers sur verre en or. Pour la réalisation technique d’un églomisé on peut se référer au livre d’André Pierre Schmitt : André Pierre, La peinture sous verre, historique, outillage, exercices, initiation, projets et dessins, éd. Atelier 45, Strasbourg, 2017.
De nombreux restaurants de Strasbourg comme : la Maison des Tanneurs, le Strissel, l’hôtel-restaurant Pax, Aux armes de Strasbourg…. possèdent des œuvres de Camille Wagner.
Camille Wagner a
travaillé également pour les cinémas
Strasbourgeois, en réalisant les affiches
de films pour les façades de cinéma. Une
époque où elles étaient peintes
à la
main, ce que l’on a tendance à oublier. Ces
créations artisanales répondant à
une commande nécessitent un grand avoir faire et du talent.
Art ou artisanat,
on peut se poser la question ?
La place de Camille Wagner dans le milieu artistique régional
Il s’agit de : Luc Hueber, Robert Heitz, Jean-jacques Hueber, Fred Tinsel, André Bricka, Louis Wagner, Nelly Stultz, Auguste Cammissar, Aloyse Freiburger, Gérard Bliekast, Michel Collin, Lucien Haffen, Robert Hirtz, Robert Warter, François Fleckinger, Paul Weiss. Les sculpteurs : Jean Henninger, René Hetzel.
C.Wagner
était membre des artistes indépendants
d’Alsace (AIDA)9,
et membre du salon des artistes
français à Paris. Il exposa : - A la Maison d’art alsacienne, rue Brulée, à Strasbourg. - Au Grand Palais, à Paris, avec le salon des artistes français - A la Maison d’art, rue de l’ancienne douane, Strasbourg - A la galerie Aktuaryus, rue de la Nuée bleue, Strasbourg - A la galerie Huffel, à Colmar -
Avec l’Aida, à Strasbourg il participa
à de nombreuses
expositions de groupe. Il participa également à des expositions avec les artistes tels que : Bricka, Tinsel, Louis Wagner, Fleckinger et bien d’autres. Egalement des expositions dans son atelier à Noël au 13 rue des Drapiers à Strasbourg. Il
pratiqua aussi bien
la peinture à l’huile sur toile que
l’aquarelle. Ci-joint quelques-unes de
ses œuvres. Camille, Edmond Wagner, Vendanges, Huile sur isorel Collection particulière © Photo: M. Meyer Camille, Edmond Wagner, Portrait, Huile sur toile Collection particulière © Photo: M. Meyer
Camille, Edmond Wagner, Portraits, Huiles sur toile (38 x 45 cm) Collection particulière © Photo: M. Meyer Camille, Edmond Wagner, Portrait, Huile sur toile Collection particulière © Photo: M. Meyer Huile sur isorel Collection particulière © Photo: M. Meyer Camille, Edmond Wagner, Cathédrale, Huile sur isorel (84 x 52 cm) Collection particulière © Photo: M. Meyer Camille, Edmond Wagner, Depuis le toit de l'opéra de Strasbourg, Aquarelle (46 x 33 cm) Collection particulière © Photo: M. Meyer Camille, Edmond Wagner, Paysage Vosgien, Huile sur contreplaqué (55 x 46 cm) Collection particulière © Photo: M. Meyer Comme nous l’avons rapidement décrite la vie professionnelle de Camille Wagner est riche de nombreuses réalisations tant artistiques, que artisanales. Cette personnalité dont le fil de la vie permet de faire revivre toute une période de l’histoire de l’Alsace, mérite d’être mise en avant et regardée avec intérêt. Les illustrations jointes à cette biographie rapide permettront d’évaluer tout le talent de Camille Wagner pour les amateurs de peinture alsacienne. [1] Note de Gabriel ANDRES, dans Lotz François, Artistes peintres alsaciens de jadis et de naguère (1880-1982), éd. Printek, Kaysersberg, 1985.p.342. [2] Archives municipales de Strasbourg, Ecole Municipale des Arts Décoratifs, registre d’inscription des élèves 1920-1938, 34MW17-21. [3] Archives municipales de Strasbourg, Ecole Municipale des Arts Décoratifs, diplôme municipal 1921-1939, 34MW95. [4] LOTZ François, Artistes peintres alsaciens de jadis et de naguère (1880-1982), éd. Printek, Kaysersberg, 1985. [5] Microfiche DNA du 07/01/1947 BNU Strasbourg. [6] SOSSON Marcel dit Marc LENOSSOS (1897-1968) est un critique d’art, poète, peintre et dessinateur. Il est membre fondateur des écrivains d’Alsace et de Lorraine. (Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne). [7] Loi d’empire du 26/07/1900, Gewerbeordnung (réglementation des affaires). [8] André Pierre, La peinture sous verre, historique, outillage, exercices, initiation, projets et dessins, éd. Atelier 45, Strasbourg, 2017,p.33. [9] http://www.aida –galerie.com/ ?page id=335/ historique ( par Pascklin) . Vu le 22/02/2017. Louis-Philippe Kamm (1882-1959) formation: école des arts décoratifs de Strasbourg (1897-1901), académie des beaux-arts de Munich (1901-1902) (1904-1908) puis Paris (1911-1912) voyages d’études en Italie, midi de la France. Professeur à l’école des arts décoratifs de Strasbourg en 1925, puis directeur de 1945 à 1953. Peintre, dessinateur, illustrateur, décors d’église, illustre « l’ami fritz » p177 F.Lotz. Auguste Cammissar (1873-1962) apprentissage chez un peintre verrier à Strasbourg, puis Académie de Karlsruhe, séjour à Munich et à Vienne. En 1884 il est l’assistant de Seder. De 1896 à 1940 il fut professeur titulaire. En 1900, il étudie à Paris le verre opalisant. p64 F.Lotz. Georges Daubner (1865-1926) né à Berlin, étudie le décor de théâtre à Berlin puis le paysage. En 1892, il est professeur aux arts décoratifs de Strasbourg, et enseigne la peinture de paysage et la décoration. En 1908, il devient chef de l’atelier de décoration au théâtre municipal de Strasbourg. Emile Schneider (1873-1947) études à Belfort, à l’école des arts décoratifs de Strasbourg, à Munich, puis il s’installe à Strasbourg et voyage à Paris. Il est professeur à l’école des arts décoratifs de Strasbourg jusque 1939. Il crée le groupe de St Nicolas et son atelier privé orienté vers Paris a formé beaucoup d’élèves. p281-283 F. Lotz. Bibliographie ANDRE PIERRE, La
peinture sous verre, historique, outillage, exercices, initiation,
projets et dessins,
éd. Atelier
45, Strasbourg, 2017. ANDRES Gabriel, L’histoire
de l’Ecole Supérieure des Arts
Décoratifs de Strasbourg,
éd. Jérome Do Bentzinger, Strasbourg, 2014 BAUER A. et CARPENTIER J., répertoire
des artistes d’Alsace des XIXe et
XXe siècles, peintres,
sculpteurs,
graveurs, dessinateurs, éd. Oberlin, V-W-X-Y-Z, p.
408-409. BEFORT Paul-André, DAUL
Léon, KONTZLER
Chantal, LERY Pierre, Strasbourg 1900,
Carrefour des arts nouveaux,
éd.
Place Stanislas, Nancy, 2010. BOUTILLON Aline,
l’art du fixé sous verre à Paris,
Vitrines du passé, éd. Artena, Paris,
2006. GEYSSANT Jeannine, peintures
sous verre de l’antiquité à nos jours,
églomisés, fixés et
estampes, éd. Massin, Paris, 2008. HEITZ Robert, la peinture en Alsace, 1050-1950,
éd. DNA, Strasbourg, 1975. JUNG Pascal, Wey Jean-Claude, couleurs
et lumières d’Alsace, libre regard
sur les artistes peintres alsaciens
de la période 1870-1970, éd. Les
Petites Vagues, La Broque, 2009. KOENIG Nelly, l’école
des arts décoratifs de Strasbourg de 1919 à
1939 : entre
méthodes allemandes et méthodes
françaises, volume 1, et 2, Thèse pour
le diplôme d’archiviste paléographe,
Ecole Nationale des Chartes, 2012. LOTZ François,
artistes peintres alsaciens de jadis et de naguère
(1880-1982),
éd. Printek, Kaysersberg, 1985.p.342. LOTZ François, artistes peintres
d’Alsace, vivant et œuvrant à la date du
1er janvier 1982, éd.
Printek, Kaysersberg, 1985. SAISONS D’ALSACE,
étapes de l’art alsacien, XIXe et XXe
siècles, HEITZ Robert, nouvelle série,
n° 47, Strasbourg, 1973
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