Culturel
" L'analyse
d'une Oeuvre "
par
François Walgenwitz
francois.walgenwitz@sfr.fr
![]() L’Amandier Huile
sur toile, 120 x 130 cm (2007) |
«C’est
comme si je me promenais dans le paysage», dit Roger Mühl pour
préciser sa manière de peindre. Une promenade attentive, procédant de cette
attention que lui a enseignée son maître, Léon Lehmann. Celle qui capte
l’élégance des formes, le rythme intérieur des arbres et des plantes sauvages
et lui permet de saisir leurs fonctions, leurs métamorphoses en cours, «invisibles à nos yeux, si évidentes aux
siens.»
«Marchant à son pas,
sans précipitation inutile, calme et maître de lui» (*), il est sensible
aux vertus intrinsèques des couleurs. Car il pense que chaque couleur a sa
valeur propre, qu’elle doit se suffire et vivre en elle-même, sensible plus
profondément encore à la lumière qui est son aboutissement…
Ne peignant quasiment jamais sur le motif, il s’imprègne de
l’offrande que vient de lui faire la nature. De retour dans son atelier, il la
refonde en y faisant passer ses sensations, ses émotions, transcendant le réel,
tout en le respectant dans un style tangible.
Toutes les spécificités du style et de la technique de
Roger Mühl sont présentes dans cette œuvre. Et, de facto, en filigrane, sa
personnalité.
Il flâne, musadre, suit un chemin buissonnier, irréel,
éthéré, aux alternances surprenantes de plages blanches et bleu-clair. Il
traverse ainsi des frondaisons aux formes simplifiées; leurs masses, disposées
de façon à obtenir les justes proportions. Les traits de pinceau, délibérément
affirmés, rugueux, bigarrés, confèrent à l’amandier et à chaque massif leur
structure, leur mouvement; la matière épaisse s’y prête à merveille. C’est là
que réside la modernité de son art.
A l’équilibre des éléments du paysage, obtenu par le dessin
de l’esquisse, répond celui des couleurs dont la douceur caractéristique de
l’artiste est bien présente: palette chaude, palette froide, contrastes
nécessaires pour donner vie au tableau, sont agréablement distribués. Le rose
printanier de l’amandier, le jaillissement le l’aloès, les nuances de jaune
–mimosa, assurent la «couleur locale».
Les valeurs passent du plus lumineux au plus ombré, du
pastel aux couleurs pures. La lumière, quand elle n’est pas teintée de rose ou
de jaune, éclate dans le blanc que Roger Mühl affectionne passionnément.
En pénétrant dans cette ambiance à la fois luxuriante,
édénique, enveloppante, ne laissant qu’une discrète échappée de ciel bleu, nous
ressentons cette harmonie obtenue en allant à l’essentiel, cette émotion
transfigurée par la technique, cette paix intérieure et cette joie d’exister
que Roger Mühl a voulue et parfaitement réussi à partager avec nous.
A
présent, laissons-nous aller à la contemplation…

faite de cette monographie sans l'autorisation de son auteur.