Culturel



" L'analyse d'une Oeuvre "                      

                   par François Walgenwitz        francois.walgenwitz@sfr.fr


                          

Pierre Andlauer 

(1941-2016)



© Pierre Andlauer
Champ de Colza – 1980-85 – Format P80 – Collection particulière


    L’œuvre de Pierre Andlauer, atteste la fragilité de la barrière entre le figuratif et l’abstrait.

    Dans cette huile sur toile, justement, les deux cohabitent, se combinent, se conjuguent. D’une part, nous voyons bien qu’il s’agit d’un paysage organisé en plans successifs, distincts. Aux herbes et plantes fleuries du premier plan, sans doute le bord d’un chemin de traverse, succède un vaste champ, semble-t-il planté de colza, qui déborde largement des deux côtés du cadre. Puis, se succèdent immédiatement deux plans constitués d’une part d’une alternance de hameaux et de bosquets et d’autre part d’un fond montagneux; le tout, dominé par un ciel gris-clair, délicatement nuancé de mauve d’où le soleil est absent alors que sa lumière paraît diluée dans l’étendue jaune presque unie.

    Il émane de ce paysage une agréable impression de repos, d’équilibre qui lui vient du dosage équitable des lignes horizontales et verticales et de l’alternance savamment disposée des couleurs chaudes, claires et des couleurs froides, sombres.

    L’abstraction y trouve son compte dans les détails; celui des fleurs suggérées par de délicates touches de bleu, de blanc, d’orangé, celui également des bosquets et des maisons qui émergent du présumé colza. Pour en apprécier toute la beauté, tout l’art, il faut s’approcher, zoomer sur ces grappes, ces ombelles, ces corymbes, ces cymes. On découvre alors qu’elles sont élaborées d’une infinité de tesselles formant de petites mosaïques quelque peu anarchiques, projetées en l’air, au-dessus de leurs tiges et de leurs feuilles déchiquetées, lacérées, par le couteau de l’artiste.

    Car nous sommes devant une huile sur toile exécutée au couteau, un couteau énergique qui plaque de larges aplats et qui, cependant, effleure la toile avec retenue  quand il s’agit d’y déposer les délicates corolles et autres capitules…

Et ce n’est pas facile!...

    Car la technique du couteau requiert une rigueur absolue, une sûreté du trait sans faille que Pierre Andlauer possède parfaitement. A partir d’un croquis crayonné, il a élaboré ce tableau de taille respectable (146 x 97 cm…) en utilisant, selon son habitude, des pigments qui lui viennent des Pays-Bas, c'est-à-dire de la meilleure qualité qui soit, garante de la pérennité de l’œuvre du peintre.

    Pierre Andlauer a mis ce paysage en exergue parce qu’il est représentatif de ce qui, dans sa carrière d’artiste, est une constante: transposer la réalité dans une persévérante recherche de la beauté et de l’harmonie des éléments plastiques; à partir du réel et de la distance qu’il prend avec lui, proposer par son expressivité abstraite une vision nouvelle, personnelle du monde.


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