Culturel
" L'analyse
d'une Oeuvre "
par
François Walgenwitz
francois.walgenwitz@sfr.frLuc Dornstetter
Carré posé sur la pointe
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Choisir
une œuvre à
analyser parmi plus de sept cents temperas et aquarelles toutes
abouties selon
les exigences du maître, n’a pas
été chose facile.
Alors, pourquoi «La Mise au Tombeau»?
Plusieurs raisons l’expliquent qui n’obéissent à aucune hiérarchie.
Le
format, ce carré qui s’impose à
l’observateur parce qu’il est dressé sur
sa
pointe et comme projeté en avant. Parce que, pour Luc
Dornstetter, le carré est
l’espace privilégié pour organiser
formes et couleurs ainsi qu’il l’a
prouvé en
2001 dans l’exposition «Variations sur le
carré».
Croquis préparatoire |
Le thème lui-même est extrêmement intéressant puisqu’il appartient à un des domaines de prédilection de l’artiste, l’art sacré. Luc Dornstetter s’est apparemment inspiré de l’Evangile selon Saint-Marc. Dans le verset intitulé «L’ensevelissement», il évoque Joseph d’Arimathie qui, «ayant acheté un linceul, descendit Jésus de la croix, l’enveloppa dans le linceul et le déposa dans une tombe qui avait été taillée dans le roc, puis il roula une pierre à l’entrée du tombeau…»
Dans l’esprit de Luc Dornstetter, «L’idée de base était de montrer la fin de la scène seul un bout de linceul dépasse encore le tombeau. Les personnages sont figés dans l’attente de sa disparition complète. La scène se déroule entre les regards de St-Jean à gauche et de Marie à droite. (Là, il prend quelque liberté avec le texte de l’évangéliste qui met en présence de l’événement Marie de Magdala et Marie, mère de Joset.) Elle est rythmée par un ensemble de cercles qui se répondent et qui représentent l’entrée de la tombe et la pierre que l’on va rouler pour la fermer. Les deux autres personnages ne sont qu’annexes et complètent la composition».
Les couleurs se mettent mutuellement en valeur. Leur organisation qui est une des constantes dans l’œuvre de Luc Dornstetter, est parfaite. Cet équilibre est rendu sensible par le contraste entre le fond noir mat de l’ouverture de la tombe et la blancheur éclatante du linceul dont le violent mouvement d’enfouissement est le seul élément dynamique de la scène. «Les couleurs des deux protagonistes principaux respectent la symbolique traditionnelle. En effet, St-Jean est souvent représenté en vert (beauté, jeunesse) et rouge, (force et charité) et Marie en bleu (ciel et éternité) et blanc (pureté). L’intérieur de la tombe est un trou noir comme une non-réponse à la question: «Où va-t-on après la mort?»
Mais, la grande originalité de ce tableau réside dans le fait que le décor végétal est à peine stylisé. Pommier et ancolie gardent leur souplesse, leurs mouvements naturels comme s’ils étaient destinés à illustrer une flore. Paradoxalement, compte tenu de la gravité de la scène, cette finesse confère à la scène un charme prenant. Or ces deux plantes sont essentielles à la compréhension du message que Luc Dornstetter veut transmettre: «Elles complètent la composition: une ancolie et un pommier en fleurs. Au Moyen-Age, si le peintre plaçait une ancolie sur son panneau cela indiquait au regardant qu’il y avait un message caché dans l’œuvre. Le pommier garni de 13 fleurs représente le Christ et les douze apôtres. En héraldique, l’ancolie est le symbole de l’amour envers Dieu et de la charité envers son prochain.
Le message caché est donc qu’il est nécessaire, pour le Christ, de passer par la mort et la tombe pour nous laver du péché originel: la désobéissance d’Eve et d’Adam, coupables d’avoir mangé le fruit défendu, qui est souvent associé à la pomme. Et donc, c’est un passage obligé pour que l’arbre puisse refleurir.»
A l’instar d’Albrecht Dürer et de l’Alsacien René.Allenbach, Luc Dornstetter a choisi de signer ses œuvres par un monogramme L.D. assorti de l’indication de l’année. La barre verticale du D est souvent formée d’une sorte de pointe ou épine, en rappel du «dorn» de son nom.
faite de cette monographie sans l'autorisation de son auteur.