Culturel
" L'analyse
d'une Oeuvre "
par
François Walgenwitz
francois.walgenwitz@sfr.fr
L'Envolée des Anges, 2017
Huile sur toile, exclusivement réalisée au pinceau (1x1m) |
Le message que
l’artiste a voulu transmettre, la signification
qu’il a voulu donner à
l’œuvre,
ne sont pas forcément saisis par le spectateur que nous
sommes. Celui-ci est
avant tout sensible aux qualités esthétiques du
tableau. Comment voit-il,
comment peut-il comprendre «L’Envolée
des Anges»?
L’œuvre est manifestement
chargée de
symboles. La ronde des angelots ailés, potelés,
joufflus symbolise, ici, la
pureté, l’innocence de l’enfant,
plutôt
que les fonctions dévolues aux chérubins de
Raphaël, porte-parole de Dieu, Ils
n’appartiennent pas aux hiérarchies
célestes présentes sur les tableaux du
Trecento.
Ils animent le firmament de la gaieté
et de la grâce de leurs frimousses, de
l’élégance de leur gestuelle, de la
légèreté de leurs
évolutions. Si Kazem Rezvanian, en les peignant, rend
visible
l’invisible, il le fait avec retenue, par touches
impressionnistes, où la
couleur est éminemment idéaliste, spiritualiste.
Elle fait rêver…Notamment ce
bleu, qui est justement la couleur originelle des ailes des
chérubins, ce bleu
qui fait penser à Victor Hugo, quand, dans «Booz
endormi», il écrit:
L’ombre était nuptiale,
auguste et solennelle;
Les anges y volaient sans doute
obscurément,
Car on voyait passer dans la nuit, par moment,
Quelque chose de bleu qui paraissait une aile.
La ronde céleste concentre sa
jubilation sur la colombe vers laquelle les regards admiratifs,
ébahis se
tournent. Elle apporte sans son envol une douce lumière qui
jaillit des
profondeurs.
Sa beauté, sa douceur, sa blancheur
immaculée, l’érigent en symbole de
pureté, de paix, d’harmonie; symbole
d’espoir, de bonheur retrouvé;
n’a-t-elle pas rapporté le rameau
d’olivier à
l’Arche de Noé? Semblable à eux par sa
légèreté, par la liberté
divine qui
l’affranchit des contingences terrestres, elle est
glorifiée par les anges.
Sa
structure, son organisation et l’impression de paix et
d’harmonie qui s’en
dégage, apparentent ce tableau aux mandalas, terme
bouddhiste. La construction
de ces diagrammes circulaires, inscrits dans un carré, est
une pratique
spirituelle, un support de méditation. A l’instar
de «L’Envolée des Anges» la
mandala est remplie de symboles. Ni l’une ni
l’autre ne sont de simples
dessins. Cette œuvre de Kazem Rezvanian n’a-t-elle
pas, elle aussi, un pouvoir
thérapeutique pour retrouver équilibre, paix
intérieure et cohérence? N’est-elle
pas également un outil d’évolution?
Notons que Camille Claus (1920-2005),
imprégné de philosophie Zen, s’est
servi de ces cercles magiques comme
technique de relaxation. (Voir infra)
En fait, l’intention de Kazem
Rezvanian, qui est à l’origine de la
réalisation de ce chef-d’œuvre de
poésie,
est différente. L’artiste a bien voulu nous
révéler son dessein:
«J’ai toujours
rêvé de voler
comme les oiseaux. Petit, à onze ans, je sautais dans
l’espoir de pouvoir
m’envoler comme eux et j’en venais même
à les jalouser. Je voulais y arriver…
Un jour,
mon père me demanda ce que j’étais en
train de faire. Je lui ai donc expliqué
mon projet de pouvoir m’envoler.
Il m’a dit
que l’attraction terrestre, la gravité, ne pouvait
pas me permettre de faire
cela, qu’elle nous maintient au sol, que
c’était impossible. Mais que je
pouvais m’envoler d’une autre façon. Il
m’a expliqué qu’il fallait que je vole
grâce à mon travail, que plus je progresserai dans
mon art, plus j’aurai
l’impression de voler dans les airs.
C’est à ce
moment-là que j’ai commencé
à travailler énormément la peinture,
sans relâche,
pour progresser.»
E
Kazem s’est métamorphosé en colombe!...
Y a-t-il plus belle motivation que ce
désir irrépressible de
s’élever? Dans toutes les acceptions du terme. Mu
par
elle, Kazem Rezvanian a pris pleinement conscience que si on aime ce
que l’on
fait et si on fait constamment de son mieux, on devient un
maître, on jouit
pleinement de la vie. Il s’est, dès lors,
placé sur le chemin qui conduit à la
liberté personnelle.
Camille Claus
L'Oeil de la Nuit |
faite de cette monographie sans l'autorisation de son auteur.