Culturel
" L'analyse
d'une Oeuvre "
par
François Walgenwitz
francois.walgenwitz@sfr.frEugène Noack
Le Printemps, 1979 Aquarelle |
Outre Colmar, la nature, les fleurs, les arbres, sont très présents dans l’œuvre d’Eugène Noack. Les plaisirs, les émotions que lui procurent les éclosions printanières, la plénitude estivale, les flamboiements de l’automne et les fantasmagories de l’hiver, ont naturellement porté notre artiste à chanter les quatre saisons.
Voici le Printemps, tel qu’il le voit, tel qu’il le ressent en 1979; c’est à dire dans l’ultime épisode de son parcours artistique. Sa vision, alors, est bien différente de celle de 1952. C’est toujours du Noack, mais un Noack sublimé.
Les aplats aux couleurs pures, plutôt vives sont abandonnés au profit de touches en fines petites arabesques impressionnistes. La rigueur du style rappelant la gravure sur bois a également disparu. Les arbres aux frondaisons, à présent, vaporeuses, discrètes, ont perdu le graphisme précis de leur ramure d’avant. La grande liberté de mouvement qu’Eugène Noack a adoptée, est en harmonie avec les couleurs rompues, pastel, très douces.
Son Printemps est symbolisé par le mariage, signe d’avenir radieux qui se déroule en pente douce!...Promesse de félicité. Le fougueux élan des chevaux lancés au galop stimulés par le cor et le fouet du cocher ne laisse pas de doute là-dessus…D’autant plus que l’idylle du couple bénéficie de la bénédiction de la Vierge dont l’étrange statue se dresse à l’entrée du pont. Ce dynamisme confère à l’attelage une légèreté proche de la lévitation…
Notre attention est centrée sur l’événement. Il en résulte une unité d’action qui, combinée à l’unité de lieu, permet de déduire que ce tableau est de conception classique. Point de détails foisonnants, donc, point de dissipation.
Eugène Noack a choisi le point de vue en contre plongée. Le regard est guidé vers le haut, ce qui met le sujet à l’honneur et permet de révéler, à travers la béante arche de l’antique pont, un arrière-plan qui donne au tableau une profondeur aérée
Le salut de la jeune épousée s’adresse autant à nous qui la regardons passer qu’aux personnages du tableau: une famille avec deux enfants qui préfigure le destin chanceux des jeunes époux.
L’anecdote, inséparable des «histoires» racontées par Eugène, n’est pas oubliée: le pêcheur à la ligne qui répond avec enthousiasme au geste d’adieu de la mariée en agitant son chapeau, ne se rend pas compte que le poisson mord…
«Le beau
dérive du vrai» affirme
Boileau dans son Art poétique classique. Ce tableau en est
l’illustration
optimale par la clarté du message d’où
toute afféterie est bannie et par
l’adéquation parfaite entre la forme et le sujet.
L’harmonie qui en émane, est
l’expression de la sensibilité
d’Eugène Noack. Sa sensibilité est
celle d’un
poète et ce tableau, dialogue entre le peintre et le
poète, est un chef-d’œuvre
tout en nuances. Ce qu’aurait aimé Verlaine qui
disait:
Car nous voulons la nuance encore
Pas la couleur, rien que la nuance
Oh! La nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la
flûte au cor
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Le Printemps, 1952
Aquarelle
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L'écureuil... La "marque" d'Eugène Noack ? | |
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